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Fév / 15

Prix Ilan Halimi: des jeunes mobilisés contre les préjugés racistes et antisémites

By / Florian Dacheux /

Lundi 13 février s’est tenue la 5e édition du Prix Ilan Halimi qui récompense des collectifs de jeunes de moins de 25 ans qui s’engagent contre les préjugés racistes et antisémites. Fondé par la DILCRAH en 2018, ce prix porte le nom d’Ilan Halimi, jeune français enlevé, séquestré et torturé, mort de la haine antisémite le 13 février 2006, le long des voies ferrées du RER C à Sainte-Geneviève-des-Bois. Il avait 23 ans. 

Prix Ilan Halimi: des jeunes mobilisés contre les préjugés racistes et antisémites

«Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous ». En choisissant de citer Frantz Fanon dans son discours introductif, Sophie Elizéon, déléguée interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH), a souhaité traduire avec conviction le sens des travaux réalisés et récompensés lundi 13 février depuis l’Hôtel de Bourvallais, l’antre du ministère de la justice situé place Vendôme à Paris. En présence des ministres Éric Dupond-Moretti (Justice), Pap Ndiaye (Éducation Nationale), Rima Abdul Malak (Culture) et Isabelle Lonvis-Rome (Egalité et Diversité), quatre groupes ont été récompensés pour leur engagement contre les discriminations et les racismes. A commencer par de jeunes détenus, du centre scolaire du quartier mineur du centre pénitentiaire de Liancourt (Oise), qui ont reçu le Grand Prix pour Dans leurs Yeux, une exposition interactive de huit affiches, un questionnaire et un quiz sur les stéréotypes. Alors que la réalisation visuelle a été confiée à une classe d’un lycée professionnel en graphisme de l’Oise, dans le cadre de travaux sur les préjugés, le projet a ensuite été soumis à une classe élémentaire comme porte d’entrée à un projet plus global sur le harcèlement. Composé de personnalités du monde du sport, de la culture, de l’éducation, de la citoyenneté et de l’engagement, le jury a été touché par la pluralité des publics impliqués, mais aussi par un projet qui répond à une réalité : le racisme en prison. « Il nous semble que l’implication de jeunes détenus est original et surtout indispensable, surtout lorsque sa genèse fait suite à une série d’altercation à caractère raciste, a affirmé le Comité Egalité 360° de Radio France, membre du jury présidé par la romancière et cinéaste Émilie Frèche. Le racisme en prison est un problème majeur dont on ne parle pas assez et qui n’est probablement pas suffisamment pris en compte. Nous avons vu dans ce projet une grande valeur pédagogique et préventive. »

« Le racisme et l’antisémitisme, il faut les traiter comme une maladie. Voici notre remède. La prochaine fois, on viendra avec un vaccin. »

Trois prix du jury ont également été remis. Les 5 jeunes du centre social Simone Veil à Angerville (Essonne) ont fait forte impression avec Les Xénophobes Anonymes, un projet audiovisuel inspiré de celui des Alcooliques Anonymes. A travers un court-métrage fictionnel mettant en scène une séance de cohésion pour xénophobes, on y voit notamment deux rappeurs inspirés dont la qualité des textes a laissé les ministres bouches bées. « Le racisme et l’antisémitisme, il faut les traiter comme une maladie, ont expliqué au micro Rokhaya et les siens. Voici notre remède. La prochaine fois, on viendra avec un vaccin. » « Cela représente deux ans de travail, confie à son tour Reda, leur éducateur. Le clip et le morceau de rap seront en ligne courant mars. »

Côté créativité et inventivité, les élèves d’une classe de CM1/2 de l’école élémentaire Joliot-Curie à Bagneux (Hauts-de-Seine) ne sont pas en reste. Ces derniers ont été récompensés pour la création d’un Petit musée pour la paix, où sont exposées une trentaine d’œuvres qu’ils ont réalisé. Ce musée, situé au cœur de la cité de la Pierre Plate, où fut séquestré Ilan Halimi, aborde les questions de discriminations, racisme, et antisémitisme à travers l’histoire. Le jury a été touché par la démarche de transmission. Tels de véritables conférenciers, les élèves, qui ont par ailleurs rencontré une ancienne enfant cachée pendant la Shoah, ont assuré eux-mêmes les visites de parents d’élèves, habitants de la cité et collégiens locaux. Outre un mur de portraits d’enfants pris derrière les plaques commémoratives d’Ilan Halimi, le musée comporte une table dite de « la fraternité » arborée d’un drapeau français et d’un drapeau algérien, ainsi qu’une fresque autour de la colombe de la paix de Banksy.

Création d’un « Petit musée pour la paix », au cœur de la cité de la Pierre Plate à Bagneux, où fut séquestré Ilan Halimi.

 

Citons enfin Autour de la mémoire d’Ilan Halimi, l’intitulé du projet mené par 7 élèves de terminale du lycée professionnel Jean Guéhenno à Saint-Amand-Montrond (Cher). Après avoir assisté à la projection-débat du film 24 jours, les élèves ont effectué un travail de recherche et d’information, notamment au travers de visites des lieux de mémoire de la 2nde Guerre Mondiale sur leur territoire (découverte des puits de Guerry où 34 juifs furent jetés vivants). Ils sont ensuite allés à la rencontre des habitants du quartier Gerbaud (jeune homme de 17 ans abattu pendant la guerre) où ils ont obtenu du maire de la ville la dénomination d’un square au nom d’Ilan, inauguré le 6 décembre dernier. De leurs côtés, les ministres présents en ont profité pour rappeler la volonté du gouvernement d’agir sur ces questions, en s’appuyant sur le nouveau plan national de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine. Parmi les 80 mesures annoncées, les questions mémorielles figurent en pôle. Signe d’un réveil collectif et national sur ces enjeux majeurs ? A suivre.

 

Florian Dacheux

(crédit photos : © Florian Dacheux & Education Nationale)

Florian Dacheux