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Sep / 21

L’interculturel par la cuisine

By / Florian Dacheux /

L’interculturel par la cuisine

Alors que la Rocade Sud à Avignon est concernée par un vaste chantier de rénovation urbaine, un nouvel espace a été imaginé avec les habitants du quartier des Olivades dans une logique participative. Situé cour de l’Alizé, cet espace de détente provisoire accueille des animations proposées par des associations du territoire en amont de la destruction des immeubles. A l’instar de Label Epique qui, depuis trois ans, coordonne des ateliers pédagogiques autour du tri sélectif, de l’alimentation et de la cuisine. Rencontre.

C’est dans le cadre d’une vaste opération de renouvellement urbain de la Rocade Sud d’Avignon que l’association Label Epique s’immerge depuis trois ans au cœur du quartier des Olivades. Portées par une démarche mémorielle, ses membres, notamment accompagnés par la psycho-clinicienne Nathalie Estadieu et l’association Un Sourire pour Tous 84, coordonnent des actions culturelles et pédagogiques. « L’idée, c’est de pouvoir proposer des ateliers multiples pour recréer du lien social, explique Franck Halimi, à l’initiative du projet avec Label Epique. Notre boulot est de nous adapter aux envies des habitants. Ils ont bien souvent des richesses qu’eux-mêmes ignorent. Notre travail est de les révéler. » Il poursuit : « Bien souvent, le problème, dans le cadre d’une rénovation urbaine, est qu’on ne s’occupe pas de l’humain. Ce sont des gens qui viennent pour la plupart d’ailleurs et qui ont déjà vécu un arrachement, un déracinement. Ils prennent ensuite des habitudes dans leur immeuble. Puis on leur dit un jour qu’il faut tout recommencer. Ce n’est pas si simple. »  

« La cuisine, un endroit de partage »

Après avoir travaillé avec la compagnie Deraïdenz autour d’une sensibilisation au tri des déchets, Label Epique a fait fabriquer des éléments de cuisine mobile pour travailler sur l’alimentation avec des produits locaux issus d’une ferme urbaine de la Ceinture Verte d’Avignon. L’atelier encadré par Thomas Degand, chef cuisinier et travailleur social, a occupé une place centrale dans ce projet subtilement intitulé “L’estomac dans les talents”. « Notre idée et notre travail, c’est comment on peut déconstruire leurs plats préférés en les retravaillant avec d’autres produits, témoigne Thomas Degand. On l’a fait sur du tacos, du tajine, de la paëlla, etc. L’idée est de les surprendre en les faisant cuisiner par eux-mêmes, en s’appuyant sur leur savoir-faire. Cela crée des échanges et de l’interculturalité. La cuisine reste un endroit de partage. » Un partage que certaines familles se sont appropriées. Un bouillonnement culturel en pied d’immeubles. « Je suis contente de ses activités nouvelles qui rassemblent, affirme Djamila, qui habite depuis neuf ans dans le quartier. Quand on est en cuisine, ça nous permet de partager des choses car sinon on ne se voit pas beaucoup. » 

« Faire en sorte que ce puzzle soit rassemblé dans un livre et un film. »

Fondateur du laboratoire de la photographie sociale et populaire, Thomas Bohl, ancré sur le territoire depuis près de 15 ans, a intégré le projet au printemps dernier.

Anthotype

« C’était un vrai régal, se réjouit-il, tout sourire. Ensemble, on a documenté en images les actions auxquelles les habitants participaient tels que l’atelier cuisine, celle des Petits Débrouillards avec leur vélo blender ainsi que le collectif LSC qui fabrique des jeux à partir d’objets recyclés. Nous avons travaillé sur les procédés de l’anthotype qui consiste, grâce à des jus de légumes, à faire ressortir les photos sans encre. »

De cette expérience, découlera d’ici la fin de l’année l’édition d’un livre de recettes, financé par le bailleur social Grand Delta Habitat, prenant en compte les photos et les paroles collectées. En complément de cet objet de mémoire, un film, tourné par Ocarina Création, sera produit. « On va essayer de faire en sorte que ce puzzle soit rassemblé dans un livre et un film, de façon à rendre hommage et justice à ce qui s’est passé dans la réalité », conclut Franck Halimi. De quoi laisser une belle empreinte.

 

Yassine Elbote 

 

© photos Y.E. / F.D.

(Dans le cadre de son stage encadré par Florian Dacheux, en partenariat avec la Mission Locale du Grand Avignon et le dispositif « Classe Départ »)

Florian Dacheux