Mai 2021 – Face caméra pour faire face à l’histoire

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Mai 2021 – Face caméra pour faire face à l’histoire

By / Florian Dacheux /

La rédaction vient de publier ses premières vidéos pédagogiques tirées de notre ouvrage collectif sur l’histoire de l’esclavage et de la traite négrière. Pour ce faire, nous avons volontairement fait appel à de jeunes comédiens pour mieux transmettre des vérités méconnues. Des vérités essentielles pour notre vivre ensemble.

Mai 2021 – Face caméra pour faire face à l’histoire

Nous sommes le 21 mai 2001. La loi Taubira, tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité dans les commémorations mais surtout au cœur des livres, est adoptée à l’Assemblée Nationale. Vingt ans plus tard, la transmission et l’enseignement de cette histoire restent pourtant très insuffisants. Depuis 2006, nous commémorons malgré tout le 10 mai, date d’adoption par le Sénat du texte définitif de la loi, la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition. Entre-temps, les pensées d’extrême droite se sont amplifiées, les contrôles au faciès ne sont pas pris au sérieux, et on s’amuse toujours des blackface. Sans parler du silence, ou de la minimisation du sujet, lors des récents hommages autour du bicentenaire de la mort de Napoléon, empereur pourtant connu pour avoir rétabli l’esclavage en 1802… Non, le sujet n’est pas clos. Et le déni perdure malgré certains progrès significatifs, comme la création de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage. C’est dans ce contexte que notre rédaction vient de publier un livre intitulé L’Histoire de l’Esclavage et de la Traite négrière : 10 nouvelles approches aux Editions Librio, résultat de plusieurs mois d’entretiens avec d’éminents spécialistes du sujet. Pour aller plus loin, Marc Cheb Sun, le coordinateur de l’ouvrage et directeur éditorial de D’Ailleurs & D’Ici, a souhaité impulser le tournage de vidéos pédagogiques tirées du livre. Réalisées par Albérick Tode, assisté de Nahid El M’Rabet, ces six premières vidéos, soutenues par la Dilcrach et la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage, mettent en scène de jeunes comédiens lisant des extraits. 

Pour mener le travail préparatoire, nous avons fait appel à Zem-Zem, metteure en scène et professeure de théâtre à l’association Andromède basée dans les Yvelines. « Etant donné qu’il y avait une volonté de sensibiliser la jeunesse, Marc cherchait de jeunes comédiens, témoigne Zem-Zem. La démarche m’a tout de suite emballée et nous avons choisi Carla et Yaëlle. Carla a intégré cette année ma compagnie Azart dans le cadre du spectacle Barbara et Yaëlle prend toujours des cours avec moi. Je leur ai dit d’être le plus naturel possible. Jouer devant des caméras, c’est différent. Il faut enlever tous les codes du théâtre. Les textes étaient très riches, contenaient beaucoup de détails, de dates. Le but était d’arriver à un rendu pas trop scolaire, quelque chose de souple qui donne envie d’écouter. »

"Cela donne envie d'en parler autour de nous."

Immergées dans une ambiance musicale signée Marc Cheb Sun et un décor dessiné par Hervé Pinel, les deux adolescentes ont livré une prestation à la hauteur de nos attentes. Au-delà du tournage en lui-même, elles en ressortent grandies. Conscientes d’avoir participé à un travail mémoriel essentiel, tant ces questions historiques sont devenues fractures, faute de transmission. « Tourner dans un studio professionnel était un exercice tout nouveau pour moi, explique Carla Wolniewicz-Mezzetti. C’est un sujet qui fait écho à l’actualité et je trouve ça très bien de sensibiliser les gens. Ce qui m’a touché, ce sont tous ces sacrifices qu’ont dû faire ces femmes et ces hommes pour essayer de s’en sortir avec beaucoup de courage. Cela donne envie d’en parler. Au collège, on ne parle pas concrètement de l’esclavage. Cette année, on a parlé du racisme et de l’affaire George Floyd aux Etats-Unis. On parle des différences, qu’il faut savoir accepter tout le monde, en éliminant au maximum ce qui a pu s’ancrer dans les esprits depuis cette période. » Au tour de Yaëlle Ntjam de rebondir : « Ce projet m’a séduit car il parle d’un sujet qui me touche énormément. J’ai appris quelle était la vision des hommes, femmes et enfants noirs à l’époque et quelles étaient leurs conditions de vie. Cela m’a donné envie d’en savoir davantage et d’en parler autour de moi car tout le monde devrait connaître cette partie de l’histoire. Cela peut aider le pays à mieux vivre ensemble.»

"Cette histoire, c’est notre histoire. Elle explique pourquoi la France est multiculturelle."

Aider tous les interlocuteurs jeunesse à aborder ces questions. Tel est donc l’enjeu du livre comme des vidéos. Des outils utilisables dans des structures jeunesse, bibliothèques et médiathèques municipales, par des associations, en collège et lycée. « Ce travail de mémoire est important afin que tous les Français soient pris en compte, corrobore Gilles Gnamlin, comédien membre de la Compagnie Azart qui s’est joint au casting. Comme le dit Christiane Taubira dans son livre L’esclavage raconté à ma fille, la traite, l’esclavage et les massacres coloniaux portaient en leur germe l’holocauste et la Shoah. Dans la lecture des textes que j’ai interprété, moi-même j’ai appris des choses. Il est temps que la France pose un regard vrai sur l’entièreté de son histoire avec apaisement et sérénité, afin que l’entièreté des enfants de France puisse comprendre comment s’est construit ce pays. Et ainsi pouvoir se sentir complètement Français dans la société, grandir ensemble et enseigner ensuite eux-mêmes à leurs enfants comment s’est faite la France. » Alors qu’elle travaille depuis trois ans sur une création théâtrale (Rebelle) inspirée de l’œuvre Et les chiens se taisaient d’Aimé Césaire, Zem-Zem ne pouvait qu’embrasser l’idée d’un tel projet. La transmission par l’art est selon elle une des clés. « J’ai vraiment ressenti le plaisir de Carla et Yaëlle de participer à quelque chose d’important, confie-t-elle. Elles ont appris énormément d’informations tout en réalisant leur passion de jouer. Réussir à éduquer par des outils différents du système scolaire me semble très pertinent. Cette histoire, c’est notre histoire. Elle explique pourquoi la France est multiculturelle. » Une histoire complexe, entre héritages et traumatismes, à diffuser sans modération dans l’idée de combattre les racines du racisme d’hier et d’aujourd’hui.

 

Florian Dacheux

Conçues pour une large diffusion auprès d’un public jeune, ces vidéos intégreront notre centre de ressources en ligne dédié aux encadrants en quête de contenus originaux et modernes. Des ressources qui permettent d’aborder sereinement les questions de la colonisation et de la décolonisation, de la Shoah et de l’histoire de la traite négrière.

Production : MultiKulti Média 
Direction livre et vidéos : Marc Cheb Sun / Dailleursetdici.news 
Réalisation : Albérick Tode 
Assistante réalisation : Nahid El M’Rabet
Casting et direction d’acteurs : Zem-Zem 
Comédiens-nes : Carla Wolniewicz-Mezzetti / Gilles Gnamlin  / Yaëlle Ntjam
Montage : Albérick Tode & Nahid El M’Rabet
Musique : Marc Cheb Sun
Mixage : Benoît Djevahirdjian
Illustrations : Hervé Pinel 

Vous souhaitez organiser un atelier, une rencontre-débat et/ou une soirée commémorative autour de notre livre et nos vidéos pédagogiques ? 

Contactez-nous à : multikulti196@gmail.com 

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Florian Dacheux