Avr / 20
Transhumances, l’épopée d’une génération qui cherche sa place dans le monde
Transhumances
D’habitude, lorsque j’interviens pour D’ailleurs et d’ici, c’est en tant que journaliste, ce que j’ai longtemps été avant de me consacrer à mes activités d’entrepreneur. Aujourd’hui, je revêts ma casquette d’autrice (c’est mon quatrième ouvrage et mon second roman) et je savoure de pouvoir présenter sur cet espace qui m’est cher, mon dernier-né, Transhumances.
Le mot interpelle, car il fait référence aux déplacements d’un troupeau, souvent accompagné de bergers, vers des lieux où ils pourront se nourrir. Cela désigne le pastoralisme, cette activité ancestrale pratiquée en général par les nomades. Si j’ai choisi ce titre, c’est parce que les personnages que je dépeins sont des nomades d’aujourd’hui, des nomades forcés à l’être, parce que l’histoire politique de leur pays les poussent à s’éloigner de la terre qui les a vu naître. Ce nomadisme est également présent dans leurs gènes puisqu’il s’agit en grande partie de gens d’ascendance peule, cette ethnie nomade d’Afrique de l’Ouest qui a fini par se sédentariser il y a trois siècles.
De quoi est-il vraiment question dans ce roman ? Cinq jeunes Guinéens se rendent à la manifestation organisée pour protester contre leur dirigeant, qui a pris le pouvoir par coup d’État et entend le garder par les urnes. Cette jeunesse consciente est soutenue par les partis d’opposition et tous convergent au stade du 28 septembre à Conakry, un 28 septembre 2009 d’ailleurs, pour faire front contre l’autoritarisme. Très rapidement, cela tourne au drame : 150 morts, autant de femmes violées et 1000 personnes blessées (et tout ça, c’est vraiment arrivé, pas que dans le livre…).
Après cela, il faut se reconstruire, trouver un sens à sa vie, et c’est ce que tentent de faire mes personnages, Adama, Awa, Lamine et Dalanda. Leurs parcours sont différents, leurs personnalités aussi, et cela va déterminer leur capacité à survivre à l’indicible. L’un d’entre eux, Adama, est un activiste, il résiste et refuse que des gens soient morts sans que l’on dénonce l’injustice. Cela le rend vulnérable à des représailles. Son cousin Alassane, a grandi en région parisienne et se cherche un avenir en revenant dans son pays d’origine, là où on ne le considère pas avant tout pour ce à quoi il ressemble !
Cette jeunesse en quête de sens se demande s’il faut partir se reconstruire ailleurs, parce que le traumatisme est trop grand et les perspectives trop étroites. Deux options s’offrent à eux, les pays limitrophes comme le Sénégal, ou la France, où une partie de la famille d’Adama réside depuis des décennies (entre autres son cousin Alassane). Où est leur place et comment se construire une vie digne sans se renier ou capituler ? C’est cette question universelle qu’aborde Transhumances. En toile de fond, l’exil et son impact, les assignations culturelles, l’hybridité des identités et la place de la volonté et de la résilience dans les vies.
Bilguissa Diallo
Transhumances, Éditions Elyzad.
https://www.fnac.com/a20654654/Bilguissa-Diallo-Transhumances