Fév / 17
Après la sculpture pour les Enfants Réunionnais de la Creuse qui s’élève depuis 2013 à l’aéroport Roland Garros de La Réunion, une seconde stèle vient d’être posée le 17 février 2022 à l’aéroport d’Orly, par lequel ont transité les Réunionnais déportés vers l’hexagone entre 1962 et 1984 afin de repeupler les zones rurales. Un symbole fort dans le long combat que mène la Fédération des Enfants Déracinés des DROM pour la reconnaissance de ce traumatisme.
A Orly, une stèle en mémoire des Réunionnais de la Creuse
C’est en présence du Ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, et du secrétaire d’État chargé de la protection de l’enfance, Adrien Taquet, qu’a eu lieu jeudi 17 février l’inauguration d’un monument à la mémoire des Enfants de la Creuse à l’aéroport d’Orly. Il s’agit là d’un signal fort envoyé par l’Etat, qui reconnaît véritablement la souffrance vécue par 2.015 mineurs réunionnais arrachés à leurs familles entre 1963 et 1984. Depuis le Terminal 4, une plaque blanche ornée d’un paille-en-queue a été dévoilée en leur hommage. « Un devoir de mémoire que l’État doit à ces enfants et à leurs familles, comme une reconnaissance de leurs souffrances », a déclaré Sébastien Lecornu, en référence à la responsabilité morale des pouvoirs publics de l’époque.
Pour les membres de la Fédération des enfants déracinés des DROM, la cérémonie matinale a été vécue avec beaucoup d’émotion. A commencer par leur présidente Valérie Andanson, à la fois émue et lucide. « En 2014, l’Assemblée nationale a voté une résolution mémorielle proclament que l’Etat a manqué à sa responsabilité morale à l’égard des ex-mineurs transplantés, a-t-elle d’abord rappelé. Puis une commission nationale d’experts a été créée en 2016 par le Ministère des Outre-Mer et a rendu son rapport deux ans plus tard, révélant les ressorts de cet épisode et notamment le rôle de l’aide sociale à l’enfance de l’époque. En 2017, par un courrier adressé à notre fédération, Emmanuel Macron a déclaré, je le cite, qu’il apparaît à présent avec les lumières du recul de l’Histoire, que cette politique était une faute car elle a aggravé dans bien des cas la détresse des enfants qu’elle souhaitait aider. Aujourd’hui, la stèle que nous inaugurons dans cet aéroport d’Orly fait écho de l’autre côté de la mer à la stèle érigée en 2013 à l’initiative du conseil général de La Réunion à l’aéroport Roland Garros, deux stèles qui se répondent à neuf ans de distance. Celle du départ et celle de l’arrivée. Notre histoire possède désormais deux symboles, deux marqueurs de mémoire de notre histoire. » Mais le combat est loin d’être terminé. « Cette stèle nous permet de faire un retour vers l’île sinon vers nous-mêmes, poursuit Valérie Andanson. Si la génération des Enfants de la Creuse vieillit, si certains nous ont déjà quittés, si certains souffrent encore de leur passé, si nous attendons d’autres signes de l’Etat, cette stèle marque un nouveau pas vers la reconnaissance de notre histoire et vers la réconciliation des mémoires passées, présentes, et celles de générations à venir. L’enfance déracinée doit être la préoccupation majeure des Etats de demain. A travers nos vécus, l’illustration de tout ce qu’il ne faut pas faire mais qui continue malheureusement à se dérouler aujourd’hui, nous menons un combat européen pour la protection de l’enfance et pour tous les enfants victimes d’abus. » Prochaine étape ? Le projet d’aménagement d’un lieu de mémoire et de ressources à Guéret, dans la Creuse, et à Saint-Denis de La Réunion. Le projet vient d’être soumis au gouvernement.
Fl.D.
A lire aussi, notre dossier complet paru en novembre 2019 :
Scandale d’État – La révolte des déracinés de La Réunion – dailleursetdici.news